7 questions pour mieux comprendre les liens entre langage et pensée

 

Particulièrement complexes, les rapports entre langage et pensée interrogent et divisent. Afin de vous aider à y voir un peu plus clair, nous vous proposons d’examiner ensemble quelques-unes des questions que vous pourriez vous poser sur les liens entre ces deux concepts.

 

1) Le langage trahit-il la pensée ?

Certains philosophes estiment que le langage serait réducteur par rapport à la complexité de la pensée qu’il représente. En classant les objets et concepts dans des catégories pour mieux organiser le monde qui nous entoure, et ainsi faciliter la communication, il serait incapable de retranscrire toutes les nuances de la pensée.

 

2) Le langage a-t-il une influence sur la pensée ?

Pour certains penseurs, le langage n’est qu’une simple étiquette visant à traduire une pensée déjà constituée et n’apporterait rien à la pensée en tant que telle. Pourtant, de nombreux philosophes, psychologues et linguistes du début du XXe siècle partagent l’idée selon laquelle, sans langage, il n’existerait pas de pensée construite et nous évoluerions dans un environnement rempli d’impressions et d’images abstraites.

En permettant de structurer notre pensée, les mots que nous utilisons ont un impact sur notre manière de conceptualiser le monde qui nous entoure (comment oublier la novlangue, devenue un véritable outil de domination dans le célèbre 1984 de George Orwell ?). Prenons un exemple concret pour mieux illustrer cette idée. Dans le cadre d’une expérience, il a été demandé à deux groupes d’adolescents de reproduire la figure de Rey ci-dessous.

Dessin casse-tête

Petite subtilité, cette tâche a été présentée comme un dessin au premier groupe et comme un exercice de géométrie au second. Résultat ? Dans le second groupe, les élèves qui étaient peu à l’aise avec les mathématiques ont eu tendance à perdre davantage leurs moyens et à moins bien réussir l’exercice.

 

3) La pensée a-t-elle une influence sur le langage ?

Les spécialistes en linguistique cognitive considèrent que les composants du langage découlent de schémas mentaux préexistants. En d’autres termes, ce ne serait pas le langage qui façonne la pensée, mais l’inverse. Par exemple, le concept de table précède le mot, et même quelqu’un qui aurait un trouble du langage serait en mesure d’identifier un tel objet.

 

4) La pensée et le langage sont-ils interdépendants ?

Une approche plus pragmatique consiste à affirmer que langage et pensée sont indissociables et s’enrichissent mutuellement. Ainsi, le langage ne serait ni à l’origine de la pensée, ni son reflet, mais un simple moyen d’exprimer des représentations, de faire exister la réalité sous une nouvelle forme.

 

5) La pensée est-elle universelle ?

Pour les sciences cognitives contemporaines, nous disposons d’un socle commun de pensées universelles. Les variations qui émergent relèvent majoritairement de la perception que différentes cultures peuvent avoir de certains concepts. Pour illustrer cette idée, prenons l’exemple du test de Richard Nisbett. Dans cette étude, les sujets ont été invités à choisir entre « banane » et « panda » le mot qu’ils estimaient le plus proche du terme « singe ». Résultat ? Les Occidentaux ont plutôt opté pour « panda » (les singes et les pandas sont tous deux des animaux), tandis que les Orientaux ont davantage associé le singe à la banane (les singes mangent des bananes).

 

6) Les différences entre les langues ont-elles des conséquences sur la pensée ?

Le langage étant une construction artificielle, il a tendance à créer des liens arbitraires entre le mot et la chose (à l’exception des onomatopées, qui évoquent l’objet désigné par le son). Malgré certaines racines communes, ces liens peuvent ainsi varier selon les langues. Pour preuve, certaines ne font pas la distinction entre masculin et féminin, tandis que d’autres ne disposent tout simplement d’aucun mot pour désigner certains concepts ( voir notre article au sujet des mots intraduisibles).

 

7) Existe-t-il une pensée sans langage ?

En montrant qu’un sujet présentant un dysfonctionnement du langage conserve sa capacité de réflexion, les études menées dans le domaine des neurosciences semblent confirmer cette hypothèse. Mais alors, peut-on vraiment penser ce que l’on voit ou ce que l’on ressent sans le mettre en mots ? C’est là qu’entre en jeu la notion de « langage de la pensée » (ou mentalais). Selon cette hypothèse, nous ne penserions pas dans une langue donnée, mais dans un langage interne à la fois complexe et abstrait.

Des chercheurs seraient même parvenus à créer un décodeur de langage à l’aide de l’imagerie cérébrale et de l’intelligence artificielle. L’objectif ? Traduire la pensée en langage sans qu’elle soit exprimée. S’il est encore tôt pour en mesurer les répercussions, cette découverte semble offrir des perspectives intéressantes, mais soulève toutefois un certain nombre de préoccupations éthiques. Affaire à suivre…

 

Nous l’avons vu, la question des rapports entre langage et pensée est particulièrement vaste et délicate. Vous l’aurez remarqué, cet article est loin d’être exhaustif : nous avons parfois dû prendre quelques raccourcis ou simplifier certains concepts pour le rendre plus digeste. Nous espérons cependant avoir pu vous proposer quelques pistes de réflexion qui vous donneront envie d’approfondir davantage ce sujet passionnant. Et, qui sait, peut-être proposerons-nous un autre article prochainement pour examiner plus en détail certaines de ces questions ?

 

 

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